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Stages

Brice Richiero - Publié le 30/10/2012

Avoir la bonne attitude sur le court : les solutions (2/2)

Chapô: 

Le tennis, en compétition, ce n’est pas que du physique, de la technique ou de la tactique. L’aspect mental est également primordial. Notre consultant, Makis Chamilidis, nous livre ici ses conseils pour avoir la bonne attitude sur le court et être performant.

Marquer sa motivation sur le court. Un exemple de bonne attitude à avoir comme ici Michaël Llodra - © Icon Sport
Marquer sa motivation sur le court. Un exemple de bonne attitude à avoir comme ici Michaël Llodra - © Icon Sport

Tennisleader.fr : Quand on a une mauvaise attitude, on commence par quoi pour la corriger ?

Makis Chamalidis : "Il est bien de faire une liste avec tout ce qui ne dépend pas de soi (la forme de l’adversaire, la qualité du terrain, le climat, les réactions du public...) et une autre avec toutes les petites choses que l'on peut maitriser quand on est en difficulté : son jeu de jambes, sautiller, jouer croisé, son lancer de balle, respirer et prendre son temps entre les points. Tout cela est à classer dans la catégorie de ce que l'on peut maitriser et c'est sur celle-ci, et uniquement sur celle-ci, que le joueur va devoir se concentrer."

TL. Y-a-t-il une méthode globale afin d'aider les joueurs à avoir une bonne attitude ou faut-il prendre chaque joueur au cas par cas, selon leur personnalité ?

Psychologue du sport, Makis Chamalidis a travaillé depuis 1994 avec plus de 300 sportifs et entraîneurs de haut niveau dans une vingtaine de discipline sportives en France et à l’étranger. Rattaché depuis 1997 au Centre National d’Entraînement à Roland Garros, il est aussi l’auteur du livre "Splendeurs et misères des champions".


MC. "Il y a beaucoup de joueurs qui ne parviennent pas à être concentré d'un bout à l'autre d'un match car ils ne savent pas faire la part des choses. Soit je suis top soit je suis nul, soit j'impose mon jeu soit je subis celui de l'autre, mais il n'y a rien entre les deux. Il faut parfois nuancer et se faire à l'idée de " bien mal jouer " (un concept que François Ducasse développe dans le livre «Champion dans la Tête»). Il ne faut pas prendre son meilleur niveau comme référence parce que je vais être rapidement frustré. En revanche il faut se fixer un niveau moyen en dessous duquel je ne vais pas descendre et cela fait que je produirai un niveau de jeu correct malgré les conditions et ma forme actuelle. "Je peux gagner sans jouer mon meilleur tennis ". Cela se travaille en préparant et en visualisant de nombreuses situations comme des balles de break en sa faveur ou en sa défaveur. Identifier ses pensées parasites car le premier adversaire est soi-même. Le tennis un sport où il est très difficile de rester régulier mais une chose est sure, il y a plein de situations importantes qui sont quasiment programmées à l'avance et il ne faut pas les aborder sans les avoir préparés avant le match."

TL. Donc une fois que la liste des différents éléments sur lesquels intervenir est faite, la mauvaise attitude est corrigée ?

MC. "Non, une mauvaise attitude ne peut pas se résoudre d’un jour à l’autre surtout si le joueur n'est pas conscient de son problème et s'il n'a pas l'envie de travailler dessus. Dans ces moments-là, le joueur n'est pas lui-même et est pollué par des pensées parasites. C’est toute la différence entre la dimension physique et mentale : nous avons un système immunitaire qui va, par exemple, nous donner de la fièvre si l'on a attrapé un virus. Cependant, notre cerveau n’a rien prévu pour chasser la frustration ou le doute. L'on peut être préoccupé par un élément moins important durant un match que par son propre jeu. Mais cela peut se travailler. Celui-ci consiste à identifier ses pensées parasites et à trouver des parades pour s'en détacher. On a le droit de douter pendant une rencontre mais il ne faut pas que cela dure plus de deux ou trois secondes après le point perdu. Pour la plupart des joueurs, ils ont compris ce qu'ils doivent faire mais ils ne réussissent pas à appliquer les méthodes parce que c'est plus fort qu'eux. Dans ce cas, ils doivent augmenter le rythme de réflexion sur le problème en question."

TL. Avoir la bonne attitude est-ce que ça commence avant de débuter le match ?

MC. "Oui. L’idée est de ne pas perdre d'énergie avant le match, comme traîner dans le club où il y aura beaucoup de bruit. Il faut savoir s'isoler afin de se mettre dans sa bulle et se répéter tous ses schémas tactiques. Dans ce cas, le joueur sera déjà dans le bain dès les premiers points. Il peut par exemple relire ces notes (encore faut-il en avoir pris) pour se concentrer sur les consignes à respecter ou se créer un espace où il peut dire ce qu’il ressent, par exemple en parler à un proche pour évacuer la tension."

TL. Quel est le lien entre l’adversaire que l’on joue et la bonne attitude ?

MC. "Il est très important de savoir analyser le comportement de l'adversaire sur le court, prendre une information de temps en temps sur les gestes d'humeur de l'autre joueur qui permettra de lui renvoyer plus facilement le doute dès les points à venir. À ce moment-là, il ne faut plus tenter des choses compliquées car ce sera l'adversaire qui se compliquera la vie tout seul même s'il ne faut pas non plus se contenter de renvoyer tranquillement des balles sans consistance. Si le joueur a préparé son match mental avant de rentrer sur le court, c'est là où il pourra faire la différence."

TL. Faut-il travailler son attitude à l'entraînement ?

MC. "L'entraînement est le moment où l'on commence à travailler sa concentration et donc son attitude. Mais le travail doit se faire également en dehors. Prenez cinq minutes par jour, dans un bus, dans les transports ou chez vous, pour visualiser votre attitude sur le terrain. Vous ne connaissez pas le club où vous allez jouer mais vous savez qu'il y aura un terrain de tennis. Vous ne savez pas le nombre de personnes qu'il aura au bord du court mais vous savez qu'il y aura peut-être du monde. Certaines situations sont 100% sûres de se produire : un moment de frustration suite à une balle ratée, une balle de break à gérer, conclure le jeu et souvent le set et le match... Donc il est possible de s'y préparer et d'imaginer la bonne attitude à avoir pendant ce match à venir. Et si vous faites cela régulièrement, votre cerveau aura enregistré les bonnes informations."