Richard Alvear - Publié le 18/06/2015
E. Deblicker : "Le LPR est un club unique" (2/2)
Eric Deblicker est l'une des grandes figures du tennis français. Ancien bon joueur (76ème ATP) et après avoir été coach de la plupart des meilleurs joueurs tricolores, à 63 ans il dirige désormais depuis quatre ans le Lagardère Paris-Racing, le plus grand club omnisport de France. Pour Tennisleader, et dans cette seconde partie d'entretien, ce passionné de tennis et de sport en général, évoque le tennis masculin français et ses activités actuelles au LPR.
Q/ TL : Quel est votre avis sur le tennis masculin français actuellement ?
ED : "On est sur une génération exceptionnelle (ndlr : Tsonga, Monfils, Simon, Gasquet) mais qui commence à être en fin de cycle. Ce sont de supers joueurs qui, selon moi, peuvent encore aller plus haut. Ils ont tous le potentiel pour être dans les 10 premiers mondiaux et d'ailleurs la plupart l'ont été. Après, je pense qu'aujourd'hui remporter un tournoi du Grand Chelem ne dépend pas que d'eux. La concurrence que représente Djokovic, Federer, Nadal...est extrêmement forte et les battre dans ce genre de tournois est excessivement difficile."
Q/ TL : Que faudrait-il que les joueurs français fassent pour gagner de grands tournois et un grand chelem ?
ED : "Je dirais s'habituer à gagner plus souvent. C'est toujours ce que j'ai dit à Richard (ndlr: Gasquet). C'est la gagne, et le niveau de confiance qui va avec, qui fait la différence. Il faut déjà commencer par gagner tout type de tournoi : des ATP 250, des 500, des Masters 1000. C'est aussi pour cela que les Djokovic ou Federer ont beaucoup de confiance. Je ne suis pas sûr que les joueurs français aient moins "faim" que les autres. Mais c'est une série de petites choses à droite et à gauche qui fait la différence. Etre entre 5 et 10 au classement ATP c'est une étape; Dans les 5 c'en est encore une autre. Il est probable qu'il faut qu'ils fassent un peu plus à tout point de vue. Pour l'instant ils ne sont pas encore au niveau des tout meilleurs mais ils en ont la volonté."
Q/ TL : Quelle est votre opinon sur Richard Gasquet, que vous connaisez très bien ? (ndlr : lorsque l'interview a été réalisée, le Biterrois était 29ème au classement ATP)
ED : "Le problème c'est que depuis plus d'un an Richard a des problèmes de dos qui l'empêchent de bien jouer. Il a fait deux très bonnes saisons avec une participation au Masters de Londres et je pense qu'il peut revenir dans le Top 10. Il faut qu'il s'habitue à gagner plus et c'est ce que je lui ai toujours dit. Contrairement à ce beaucoup de gens pensent, il a beaucoup de gniac et beaucoup plus que ce que l'on peut imaginer. Il a en lui cette gagne. C'est un passionné et il est joueur. Et donc comme tout joueur, il aime gagner. Le problème est que, parfois,il extériose autre chose. Il faut qu'il travaille son langage du corps."
Q/ TL : Quand la génération actuelle de trentenaires va se retirer d'ici quelques années, n'êtes- vous pas inquiet pour la suite du tennis masculin français ?
ED : "Oui, je suis inquiet. La génération actuelle a gagné chez les juniors mais actuellement ce n'est plus le cas (ndlr : à l'instar de Lucas Pouille, Benoît Paire, Mathias Bourgue...). On a un Corentin Moutet (ndlr : 16 ans et 827ème à l'ATP) et peut-être un ou deux autres jeunes espoirs mais c'est tout. C'est trop peu pour que le renouvellement générationnel se fasse. Les structures à la FFT sont bonnes mais je pense qu'il faut se remettre en question à tous les niveaux. Notamment au niveau des entraîneurs. Il faudrait qu'il y ait plus de concertation, de consultation. Il y a des gens qui ont fait des carrières de joueurs qui mériteraient d'être mieux utilsés. Moi, comme d'autres, je suis disponible même si je ne demande rien en particulier".
Q/ TL : Quel est votre opinon sur le tennis mondial actuel ?
ED : "Je pense que l'on a un niveau de jeu incroyable, le meilleur que l'on ait jamais connu. Chaque époque on a eu des grands joueurs qui ont fait progresser le jeu comme Bjorn Borg, John McEnroe ou encore Pete Sampras. Et puis il y a Roger Federer qui a inventé de nouveaux coups. Pour moi, c'est le plus grand joueur de tous les temps."
Q/ TL : Parlons du Lagardère Paris-Racing. Qu'est-ce que cela fait d'être le Directeur Général du plus gros et, en même temps, du club ominisport le plus chic de France ?
ED : "Pour moi c'est un peu un retour aux sources car j'ai grandi ici. C'est un club qui est unique. Il y a 13 000 membres, 150 salariés, le tout sur un site magnifique. C'est un club où l'on peut pratiquer aussi bien le tennis, que la natation ou le fitness. L'esprit y est familial avec beaucoup de convivialité. Je suis très fier d'en être le Directeur Général depuis quatre ans. Je ne vous cache pas que c'est beaucoup de travail et que ce n'est pas facile car il y a beaucoup d'exigence".
Q/ TL : Comment s'est passée votre nomination ?
ED : "C'est Arnaud Lagardère qui m'a demandé d'en devenir le Directeur. J'ai dit oui, bien sûr."
Q/ TL : Quels est votre rôle et les enjeux pour le club ?
ED : "Mon rôle, en relation avec la gourvernance du Groupe Lagardère, c'est de continuer à faire en sorte que cela reste un lieu unique, je dirais même un lieu magique. C'est un club qui a plus de 100 ans, qui dispose d'une piscine olympique, ouverte toute l'année. Il y 1 000 gamins à l'école de tennis. C'est un club sportif qui doit rester convivial, familial afin que les gens qui le fréquentent soient entièrement satisfaits avec cette exigence de les fidéliser. Mais aussi de donner aux nouveaux membres, l'envie de venir. C'est pourquoi, entre autres, nous continuons à améliorer les installations. Nous avons un nouveau club-house qui dispose d'un bar-restaurant qui sera ouvert de 8h à 22h, sans interruption".
Q/ TL : Il y a 13 000 membres au LPR. La volonté est-elle d'en accueillir plus ?
ED : "On peut accueillir jusqu'à 14 000 membres. Au delà ce serait difficile. Il peut y avoir du développement à faire sur les semainiers, c'est à dire ceux qui veulent faire du sport uniquement la semaine. Tout cela est à mettre en place, sachant que l'objectif évidemment est d'accueillir tout le monde dans d'excellentes conditions".
Q/ TL : Et si vous n'aviez pas travaillé dans le tennis, qu'auriez- vous aimer faire ?
ED : "(sans hésitations) Journaliste ou consultant dans le sport. Ou alors avocat dans le business du sport, de toutes façons. Comme je suis un passionné de sport en général, je pense que je n'aurais pas pu travailler ailleurs que dans ce domaine. J'ai 63 ans je ne me vois pas travailler dans un autre secteur. J'ai la chance de n'être jamais venu au boulot en traînant des pieds. Et la retraite, quand elle viendra, je ne la vois pas sans être consultant, par exemple. Je ne resterai pas inactif."
A lire : E. Deblicker : "Borg était très impressionnant" (1ère partie)
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